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mercredi, août 23, 2006

legalite democratie

Notre histoire contemporaine, nos valeurs.
Un message Internet récent, et intitulé « Frères d’armes », a retenu mon attention. L’auteur parle de notre manie, à nous autres mauritaniens, de nous débarrasser trop rapidement de notre histoire récente, et de ceux qui parmi nos dirigeants, l’ont faite. L’auteur, sorti tout droit d’outre-tombe, touche là, une plaie qui, à mon sens, mérite d’être soignée, pour notre mémoire commune, pour les générations futures. Il s’agit du crédit que nous devons accorder à nos dirigeants, à ces hommes, qui ont, chaqu’ un, dans une conjoncture donnée, mis une touche dans l’architecture de notre chère nation. Je souhaiterais qu’il soit le point de départ, d’un débat sur l’histoire récente de notre pays, débat auquel je convie nos intellectuels, nos hommes politiques, nos érudits. Nous devons en faire un débat franc, sans autre but qu’établir la vérité, pour que notre histoire s’écrive dans la continuité. Elle ne doit pas être un éternel retour à l’An I après chaque changement de régime. Elle ne doit pas être l’histoire du vainqueur, plus exactement, pour que le vainqueur soit toujours la Mauritanie et non une personne ou un groupe de personnes, pour que nous assumions notre patrimoine commun dans son ensemble, pour que nous ne soyons pas à chaque fois, obligés d’en taire une partie, sous prétexte que son héros a perdu le trône.
S’il y a quelque chose, pour lequel la Mauritanie s’est battue jusqu’au bout, c’est bien son indépendance, puis sa souveraineté. C’est le seul bien sur lequel aucun des chefs d’état qui ont dirigé notre pays, n’a jamais voulu faire la moindre concession. Mokhtar Ould Daddah s’est battu jusqu’à la dernière énergie, pour défendre l’indépendance de la Mauritanie, à telle enseigne qu’il en fit son seul et unique combat. D’abord pour traduire dans les faits cette indépendance, devant une France qui voulait maintenir indéfiniment sa tutelle sur la Mauritanie, même libre. Ensuite contre les revendications du grand frère marocain, qui ne voulait pas entendre parler de notre existence en tant qu’état, et essaya, par tous les moyens, de faire avorter notre projet national, avant de renoncer à la fin. Contre le paternalisme Sénégalais aussi, qui ne voulait voir en la Mauritanie que l’ancien territoire de l’AOF sous administration Saint-Louisienne. Le Sénégal continuait à considérer que nos populations de la vallée sont sénégalaises, et s’ingéra à ce titre, plus d’une fois, pour empêcher leur complète intégration, afin de pouvoir toujours les utiliser comme appendice de ses intérêts en Mauritanie. Enfin, contre les revendications territoriales maliennes, aux débuts des indépendances. Le Mali (anciennement Soudan Français) n’avait pas encore, totalement digéré le retour des deux Hodh à leur mère patrie, la Mauritanie. A la chute de Mokhtar Ould Daddah en 1978, l’indépendance de la Mauritanie, n’était plus contestée par aucun de ses voisins. Cela avait un prix bien sûr : le père de la nation, obnubilé par notre reconnaissance internationale, s’était beaucoup plus consacré à la bataille extérieure, qu’à la bataille intérieure. On connaissait beaucoup Mokhtar Ould Daddah à l’étranger, mais on ne connaissait pas encore la Mauritanie. On ne connaissait de la Mauritanie à l’extérieur que Mokhtar Ould Daddah lui-même. La Mauritanie, pour sa part, ne pouvait être réellement connue que si elle se développait et s’affermissait de l’intérieur, puis s’épanouissait vers l’extérieur. Autrement dit, si elle se départi du mythe du trait d’union, -ce point neutre, qui lui a commodément, été accolé, pour se remettre à jouer le rôle de rayonnement culturel arabo-islamique, qui a toujours été le sien de tous temps. Mais Mokhtar n’avait d’autres choix, dans cette étape décisive de l’existence de notre pays, que jouer son prestige personnel. Pouvait-il faire autrement ? assurément non. Le bâtisseur de l’état mauritanien moderne avait fondé sa philosophie sur ce mythe bien utile à l’époque, parce qu’il n’avait pas d’autre arme. Hors, la survie de la Mauritanie ne saurait se concevoir sans la perpétuation de ce rayonnement culturel civilisateur, qui est le ciment fondateur de son histoire et de son identité même. Ce rayonnement, qui, avant la pénétration française, avait porté son influence bien au-delà des frontières de la Mauritanie actuelle, dans les profondeurs de l’Afrique, et outre-Afrique. Le mythe du trait d’union, bien que reprit par le fondateur de l’état Mauritanien contemporain, qui y trouvait beaucoup d’avantages diplomatiques, dans sa quête incessante de reconnaissance, est en vérité un concept d’inspiration coloniale. La France l’avait subrepticement introduit dans l’esprit de nos premiers dirigeants, afin d’instaurer une dualité identitaire de fait, autant pour inverser l’influence dans le sens AOF vers la Mauritanie - au lieu du contraire qui prévalait avant-, que pour créer les germes d’une division intra mauritanienne qui serve ses intérêts néocoloniaux. Mokhtar Ould Daddah avait, en toute bonne foi, joué allégrement de ce concept. En avait-il bien mesuré les dangers véritables ? Ce qui est sûr, c’est qu’il l’a fait en toute bonne foi, pour s’attirer le soutien des jeunes états africains indépendants d’une part, soutien qui fut déterminant à notre adhésion à l’ONU, puis ensuite, il voulait se prévaloir de son aura africaine pour se faire accepter à la ligue Arabe, qui lui fermait encore ses portes. Cette ligue Arabe qui se livrait à une course vers les nouveaux états africains, qu’Israël courtisait déjà avec succès depuis longtemps, et avait besoin des excellentes relations que Mokhtar entretenait avec la plupart des états du continent noir, particulièrement, les jeunes républiques issues de l’AOF. La ligue arabe acceptera aussi la Somalie de Mohammed Siad Barré en son sein, dans le même objectif, mais sans le même succès. Mais elle ne considérait pas la Mauritanie plus arabe que la Somalie, notamment parce que les délégations de ces deux pays, utilisaient encore des interprètes, pour communiquer avec leurs homologues lors des sommets de la Ligue, ce qui était pour le moins paradoxal. Cela fit dire plus tard, à un célèbre journaliste égyptien, qui n’a connu de la Mauritanie que Mokhtar Ould Daddah, « l’africain », et les conditions qui ont présidé à l’adhésion de notre pays à la Ligue Arabe, que « la Mauritanie et la Somalie ne sont pas des pays arabes ». Ajoutez à cela que dans notre pays, les discours officiels, les campagnes électorales, les meetings populaires, l’administration, l’armée, les télécommunications, tout cela se faisait quasi-exclusivement en langue française, jusqu’au coup d’état de 1984. C’est que la colonisation française en Mauritanie, était avant toute chose, une colonisation culturelle, car la Mauritanie ne possédait en réalité qu’une seule richesse ; c’est son rayonnement culturel, et il fallait l’en dépouiller. Au moment de l’indépendance, la Mauritanie avait perdu son identité arabo-islamique. La France l’avait définitivement rattaché à son giron francophone africain. Elle tolérera à Mokhtar toutes les libertés, tous les écarts, par rapport aux intérêts français, mais la ligne rouge à ne pas dépasser, était celle de la langue française. Mokhtar avait bien voulu rendre un peu de son identité arabo-islamique à la Mauritanie, en introduisant timidement, l’enseignement de la langue arabe, mais il ne s’agissait au meilleur des cas, et à très long terme, que hisser la langue arabe au niveau de la langue française. Jamais il n’osa parler de faire de la langue arabe, la langue du pays, encore moins d’en faire la langue de travail du gouvernement et de l’administration. Au moment de la chute de Ould Daddah, la Mauritanie avait tout juste 18 ans. Jusque là, elle avait vécue dans l’innocence, presque dans l’insouciance. Elle était passée dans ses premières années par l’étape de l’enfance, où des tuteurs s’occupaient de subvenir à ses besoins les plus vitaux, et lui assuraient défense et protection. Elle connut l’âge studieux de l’écolier enthousiaste qui fait ses premières leçons, lie ses premières amitiés de classe, avec les camarades du même âge et du même quartier, sans trop s’occuper de savoir qui est qui vraiment. Puis elle eut sa crise d’adolescence, avec la guerre du Sahara, où innocemment, elle voulu jouer au grand avant l’âge. Elle faillit ne pas en ressortir. En 1978, la Mauritanie, 18 ans, était majeure. Elle avait tous ses papiers en règle, et personne ne lui contestait plus son droit. Mais en même temps, la Mauritanie accédait à l’âge difficile, cet âge où se pose avec le plus d’acuité, le problème de l’identité. En un mot, c’est le moment pour notre pays de s’affirmer, et la Mauritanie ne peut le faire sans recouvrer sa vraie personnalité. Le trait d’union convenait bien tant que la Mauritanie était encore en bas âge, car c’est la propre de tout enfant d’être un trait d’union ; un point de rencontre entre deux tuteurs. Vouloir continuer à considérer la Mauritanie comme un trait d’union, c’est tout simplement lui contester le droit de grandir, sous prétexte que cela comportait des dangers mortels pour elle. Mais un destin ne se fuit pas, et la Mauritanie n’a d’autres choix que d’assumer le destin que l’histoire lui a laissé en héritage. De 1978 à 1984 la Mauritanie est prise d’hésitation, elle est indécise. Elle ne sait sur quel choix se fixer. Elle est tiraillée, entre les tenants de la théorie du trait d’union éternel d’un côté, de l’autre, les souverainistes, qui soutiennent que l’indépendance laborieusement acquise de la Mauritanie ne lui sert à rien, tant que celle-ci n’aura pas renoué avec son héritage arabo-islamique. Puis, il y a enfin, ceux qui développent des idéologies moins proprement mauritaniennes. Durant six ans, la Mauritanie n’avait presque pas évolué sur cette question, à cause des guerres de leadership, et des tendances politiques adverses qui se disputaient le pouvoir. Aucun président ne se maintiendra suffisamment, pour parfaire l’œuvre du père fondateur. Durant cette période de tiraillement intense, la langue française continua à régner sans partage. Les discours officiels se faisaient encore en français. La justice, la police, l’armée, l’enseignement, la santé, les télécommunications, les entreprises, les banques, l’état civil, partout le français régnait encore en seigneur absolu. En interdisant l’enseignement de l’arabe aux populations noires de la vallée pendant la colonisation, la France visait à couper culturellement nos populations du sud de celles du nord. Elle pourra ainsi continuer à les utiliser comme tête de pont de l’influence française en Mauritanie, soit directement, ou via le Sénégal. A la fin de l’année 1984, émerge en Mauritanie, contre toute attente, un pouvoir qui va se maintenir 20 années d’affilées. C’est pendant ce règne que la Mauritanie recouvrira, contre vents et marées, sa pleine souveraineté. Timide et conciliant au départ, le nouvel homme fort de la Mauritanie, s’avérera intraitable sur la double question de la souveraineté et de l’identité arabo-islamique de la Mauritanie, ainsi que sur l’indépendance, chère au père de la Nation. Il ne fera sur ses questions aucune compromission, et se montrera d’une intransigeance et d’une combativité qui en dérouta plus d’un. Les pays qui, au départ, avaient pris sa timidité apparente pour de la faiblesse, et voulurent en tirer avantage, en eurent pour leur mépris. C’est sous ce règne, que la langue arabe ressuscite enfin, que l’islam est réinscrit sans équivoque dans la constitution mauritanienne. Les mosquées et les imams seront entièrement pris en charge (pour la première fois depuis l’indépendance), l’enseignement traditionnel financé à grande échelle, ses ressortissants formés dans des instituts et centres professionnels nationaux puis intégrés dans l’administration ou les entreprises. L’enseignement de la langue arabe est rendu obligatoire pour tous les citoyens mauritaniens, sans distinction de race ou d’origine. Les discours officiels sont systématiquement lus en arabe. L’arabe est désormais la langue de l’administration, l’armée, l’état civil, les documents officiels, et jusqu’à la dénomination des régions et préfectures qui deviennent Wilayas et Moughataa. La Mauritanie retrouve son âme, se réconcilie avec elle-même, avec son histoire. Bien entendu, la France ne l’entend pas de cette oreille, et tente encore une fois, d’utiliser une partie de nos populations contre l’autre, par le biais du Sénégal toujours. Un petit groupe d’intellectuels mauritaniens, issu de la vallée, et notoirement lié à la France et au Sénégal, essaye de faire croire à nos populations de la vallée, que cette arabisation est dirigée contre les noirs de Mauritanie, et qu’ils devraient s’y opposer par tous les moyens, y compris par la force. Ce petit groupe, tentera de renverser le régime, pour instaurer une république à caractère racial. Ayant échoué, il finira par prendre les armes et essayer de faire sécession. Là aussi échec. Nos populations du Sud ne se sont pas laissées entraîner par ces extrémistes. Elles ont compris que l’enseignement de l’arabe n’est pas plus aliénant pour leur culture que l’enseignement du français. La France et le Sénégal continueront à entretenir propagande et agitation contre la Mauritanie, qu’ils qualifient, par mouvements politiques interposés, d’état raciste, fasciste, esclavagiste. Mais la Mauritanie une fois encore, tiendra bon. Elle fera face à toutes les épreuves, toutes les menaces, et elle en a vécu beaucoup en vingt ans. En vingt ans, tous les pays, proches ou lointains, ont appris à respecter, quelque fois même,à craindre, la Mauritanie. Elle transigeait sur tout sauf, son identité, ses intérêts nationaux. En vingt ans elle avait retrouvé son rôle, son identité, son indépendance réelle, en un mot sa souveraineté. Non seulement elle avait retrouvé son souffle arabo-islamique, seul ciment de son peuple, qu’il soit noir ou blanc, mais elle recommençait à porter la langue arabe et l’Islam hors de ses frontières. Pour la première fois, nous avions des centres culturels à l’étranger, certes modestes encore, mais la valeur symbolique est déjà immense. Fort de notre âme retrouvée, nous pouvions avoir des relations décomplexées autant avec nos frères africains qu’avec notre espace culturel arabo-islamique. Nous pouvions prendre des positions propres à nous, indépendamment des autres, qu’ils soient africains, ou qu’ils soient arabes. Nous n’étions plus un trait d’union, écartelé entre deux tuteurs, fussent-ils nos parents. Nous avions désormais notre personnalité, notre caractère, devant la force desquels beaucoup ont appris à nous respecter, voire à nous estimer. Certains hommes politiques, quelques intellectuels, nostalgiques de la Mauritanie de leur jeunesse, de leur enfance, de leur première expérience – c’est à en croire qu’ils refusent eux-mêmes de grandir- continueront obstinément à soutenir que la Mauritanie doit revenir à sa situation de départ : le trait d’union. Bien sûr, cette lutte pour recouvrer notre identité ne s’est pas faite sans dommages. Nous avons, nous aussi, connu notre lot de dégâts collatéraux. L’arabisation s’est faite plus dans la quantité que dans la qualité, c’est irrécusable. La passion aussi dans laquelle s’est faite cette reprise en main de notre identité arabo-islamique, a donné naissance, c’est indéniable, à des extrémismes de toutes obédiences. Les tenants d’une Mauritanie, exclusivement blanche, ont essayé de tourner cette arabisation dans le sens de leur projet racial. Les idéologues d’une Mauritanie, typiquement négro-africaine, ont aussi trouvé, en cette arabisation, un argument de poids, dans leur projet sécessionniste. Entre les deux, un courant radical musulman fit, pour la première fois, son entrée. Tous ces mouvements, infiltrés dans tous les rouages militaires et civils de l’état, se sont livrés mutuellement une guerre sans merci, meurtrière des fois hélas, chaque courant politique ayant ses commanditaires étrangers. Aucun pays au monde ne s’est jamais libéré du joug extérieur sans en payer chèrement le prix. Et la Mauritanie n’a pu déroger à cette règle, ô combien impitoyable. Tous ces excès donc, étaient la rançon à payer, pour que notre pays redevienne lui-même. Mais aujourd’hui, que notre identité ne nous est plus contestée, que les dangers de notre aliénation se sont éloignés, nous devons revenir, pour réparer, sereinement, les erreurs qui, inévitablement, ont été commises. D’abord réparer les injustices d’ordre humanitaire. Ensuite revoir l’arabisation, pour qu’elle se fasse désormais en qualité et non plus seulement en quantité. L’urgence et l’extrême nécessité dans laquelle s’est faite cette arabisation ne nous donna pas d’autres choix que de privilégier la quantité sur la qualité. Maintenant que cette arabisation est définitivement acquise, qu’elle n’est plus réversible, nous pouvons, sans plus de crainte, revoir son enseignement. Nos autres langues nationales doivent aussi être introduites dans les écoles. La transcription de celles-ci, qui avait constitué un obstacle majeur pour son enseignement au début, peut, aujourd’hui, que nos populations négro-africaine se sont libérées de l’omnipotence du français, se faire sans grosse réticence, dans notre alphabet national, comme c’était le cas avant la colonisation. Même si une poignée d’irréductibles continue à en réclamer la transcription en alphabet étranger. Ces irréductibles complexés, fossoyeurs d’histoire, qui, s’ils en avaient le loisir, transcrirait même la langue arabe en caractère latin, sont des marginaux que personne n’écoute plus. Notre composante négro-africaine, a compris pour sa part, qu’il n’y aucun complexe à parler et écrire en arabe, dans un pays, qui est le leur à part entière, dont la culture est arabo-islamique. Une élite intellectuelle négro-africaine mauritanienne, totalement décomplexée, s’exprime désormais sans difficulté aucune, en arabe, car le vrai complexe c’est s’exprimer dans son pays dans une langue qui n’est ni celle de ses parents, ni celle de son milieu culturel. L’enseignement de l’Islam aussi, doit être fait dans nos traditions séculaires, d’ouverture et de tolérance absolue, en en excluant tout prosélytisme étroit. Maintenant aussi que la langue arabe est définitivement réhabilitée, l’on peut se remettre aux langues étrangères, sans craindre aucune aliénation. La France avait mal mesuré et mal compris la profondeur du malaise dû à la marginalisation de la langue arabe en Mauritanie, et avait assimilé l’arabisation entreprise par les autorités à de la francophobie caractérisée. Elle s’était comportée, en conséquence, fort hostilement à notre égard. Depuis que le français est réintroduit, pour l’enseignement des matières scientifiques, que les Alliances Françaises fleurissent, la France a compris que ce que nous voulions ce n’est pas chasser sine die le français, mais seulement réhabiliter notre langue et notre culture, en somme, préserver notre exception culturelle à nous. Depuis, elle est revenue à des sentiments plus amen envers notre pays. Elle a abandonné son paternalisme et sa possessivité maladive qui l’ont aveuglée jusque là. Elle a compris que nous voulions rester un pays francophone, mais refusions résolument d’être un pays franco-africain. La France n’a plus aucun mal à considérer que la langue française est une langue étrangère en Mauritanie, qu’elle n’est ni notre langue officielle, encore moins, notre langue nationale. Pour la première foi, elle commence, comme d’autres puissances occidentales, à nous entretenir, sans faux semblant, dans notre langue. Elle nous envoie des diplomates arabophones, nous reconnaît notre personnalité et notre identité propre. Nous n’en demandions pas plus. Quand le Président Mokhtar Ould Daddah accède au pouvoir, en tant que Président de la République, en 1960, personne ne pensait qu’il pouvait imposer l’indépendance de la Mauritanie, face aux revendications de voisins puissants. Personne ne croyait qu’il pouvait ériger les bases d’un état nation à partir de rien. Rien ne prédisposait cet homme tranquille, jovial, conciliant, doux, à tant de combativité, de persévérance, de détermination. Mokhtar n’eut qu’un seul combat, une seule obsession ; imposer la Mauritanie indépendante, et il y réussit admirablement. Toutes ses erreurs, après cela, demeurent pardonnables. Un homme ne pouvant mener qu’un seul combat à la fois, Mokhtar avait choisi le plus grand de tous. La Mauritanie lui en sera à jamais reconnaissante. C’est aux hommes qui l’entouraient, son équipe, qu’incombaient les autres combats, de moindre importance. Et s’il y a eu des échecs, c’est, à ces hommes qu’ils incombent, car Mokhtar lui avait parfaitement accompli son oeuvre. Autant Mokhtar fut le père de l’indépendance, autant Ould Taya fut incontestablement le père de la souveraineté, de l’identité retrouvée de la Mauritanie. Comme Ould Daddah, Ould Taya n’eut à son tour qu’un combat : celui de réhabiliter l’identité arabo-islamique de la Mauritanie, et partant, sa pleine souveraineté. Comme Ould Daddah, il fut obnubilé par son combat, le seul pour lequel le peuple mauritanien et l’histoire sont en droit de le juger. Comme Mokhtar, lui aussi est arrivé au pouvoir presque par hasard, et personne ne lui prêtait la capacité de faire face à plus puissants que lui. Timide, réservé, fuyant même, personne ne le créditait d’une quelconque capacité, à affronter les grands défis qui se profilaient. Comme Ould Daddah, il en époustoufla plus d’un, à commencer par l’ancienne puissance coloniale elle-même, qui avait commencé, au début à ne voir en lui que l’officier francophone, formé dans les écoles françaises, ne parlant que français, marié à une étrangère francophone, et tout à fait prédisposé à servir les intérêts français. Vingt ans plus tard, la Mauritanie était complètement sortie du giron français. Elle avait retrouvé sa langue et son identité culturelle propre. Elle prenait souverainement les décisions qui servent les intérêts de son peuple, sans en référer, ni à un père, ni un frère, ni un ami. Aujourd’hui, force est de constater que Ould Taya a lui aussi, gagné son combat, le seul qui lui soit propre, le seul qu’il devait remporter pour la Mauritanie. Les autres combats perdus sont ceux de son entourage, et les échecs, là aussi, ne seront jamais que les échecs des hommes auxquels ils étaient dévolus. Des adversaires de Ould Taya ont pris prétexte des relations avec Israël pour dire qu’il avait aliéné l’identité arabe de la Mauritanie. D’autres ont pris prétexte des lois organisant les mosquées, pour dire que Ould Taya avait aliéné la vocation islamique de la Mauritanie. D’autres enfin ont pris comme prétexte la sortie de la Mauritanie de la CEDEAO pour dire que Ould Taya avait sorti la Mauritanie de son milieu africain. C’était de bonne guerre, et le combat politique peut faire dire tout et n’importe quoi. Mais aujourd’hui que Ould Taya n’est plus là, l’on doit reconnaître que jamais la Mauritanie n’a été plus arabe que sous son règne. Aujourd’hui que Ould Taya n’est plus là, nous devons reconnaître que l’Islam est religion d’état, pour la première fois, dans l’histoire du pays, que pour la première fois, il y a un haut conseil islamique, un institut des Awqafs, que les mosquées, les imams, les Mahadras, les centres et instituts islamiques, sont entièrement financés par l’état. Aujourd’hui que Ould Taya n’est plus là, nous devons reconnaître, que nous entretenons, des relations avec tous les pays africains sans exception, et ce, ne fut guère le cas par le passé. Jamais une crise, quelle qu’en soit la gravité, n’a poussé la Mauritanie, sous Ould Taya, à couper ses relations diplomatiques avec un pays frère africain. Cela pourtant, arrivait assez facilement avant. Mokhtar Ould Daddah a bâti l’indépendance de la Mauritanie, mais Ould Taya n’a pas continué son action ; Ould Taya l’a complétée. Si Ould Taya avait continué la politique de Ould Daddah, il n’en aurait pas été le digne héritier. Pour être l’héritier de Ould Daddah, il ne faut être ni son fils, ni son frère, ni son ami. Pour être l’héritier de Ould Daddah, il ne faut pas continuer sa politique ; il faut compléter son œuvre. Pour être le digne héritier de Mokhtar Ould Daddah, il faut donner à la Mauritanie sa pleine souveraineté, réhabiliter son identité arabo-islamique perdue, faire respecter la Mauritanie de tous, sinon l’indépendance chèrement acquise par le fondateur n’aura à la fin servi à rien, sinon peut-être à manger et à boire.
Il restera, de la responsabilité de leurs successeurs,le devoir de maintenir les acquis, et celui, à leur tours,de mériter les hommages de la Mauritanie. Condamner les autres, ne me parait pas être une action suffisante, ou constructive en elle-même . Un appendice s’impose. Mohameden O/ Sidi O/ Ebiery

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